C’est par le judas qu’elle le vit pour la première fois. Grand, un mètre quatre-vingt-six, un manteau sombre sur de larges épaules, un chapeau qui ne lui permit pas de voir son visage. Elle se tourna vers son bureau songea une dernière fois à la notice qu’elle devait rendre. Elle pris les clés dans son sac et ouvrit la porte.
"Madame Emma Sacks ?
– Non mademoiselle Spring, répondit-elle. Je ne suis plus Madame Sacks depuis trois ans déjà." Les initiales n’ont pas changé - souvent elle se faisait cette réflexion.
– Pourrais-je m’entretenir avec vous sans vous importuner ?
– J’aurais très peu de temps à vous accorder, un travail urgent à finir."
Elle convia l’inconnu à entrer sans lui proposer d’enlever son manteau. Regardant son visage fatigué, elle lui proposa une tasse de thé. N’ayant pas l’intention de s’attarder, il refusa. C’est le moment qu’il choisit pour enfin de présenter. A l’annonce de son nom, elle se figea, tétanisé par les mots qu’elle venait d’entendre.
Ce père (Maurice) dont elle n’avait jamais vu le visage, jamais entendu sa voix, restait stupéfait de ces traits qui leur étaient communs : cette couleur d’yeux gris perle, pourtant très rare, le grain de beauté placé au-dessus de l’arcade sourcilière et surtout la tache de naissance de la forme d’un lapin dans le cou. Sa voix mélancolique lui expliqua la raison de sa venue : la connaître. Il lui expliqua tous les moyens qu’il avait mis en place pour la retrouver contre la volonté de Katherine (la mère de Jessica). Katherine avait éloigné Maurice de sa fille par convictions religieuses. Maurice avait engagé des détectives privés pour tenter de la retrouver : sans résultats jusqu’à aujourd’hui. La joie qu’il éprouvait ne fut guère partagée par Jessica....
