Sentant l’odeur des girolles, le père tourna la tête. Malgré la perte de mémoire liée à sa maladie, les odeurs pouvaient réveiller en lui des souvenirs.
Alors, en ces instants fugitifs, il pouvait retrouver un semblant d’humanité.
– Faisons une omelette pour ce soir, clama-t-il gaiement en se levant.
Quelle heure est-il ? C’est encore la nuit. Qu’est-ce qu’il se passe ?
J’ai chaud. Puis j’ai froid. Je sens bien que je dois me lever mais la force me manque. Je vais vomir. C’est sûr c’est les champignons... Est-ce qu’il se serait trompé en les cueillant ? Il fait de plus en plus de choses bizarres ces derniers temps...
Ca n’a pas raté. Je sens la fièvre qui monte, je frissonne, et la nausée m’envahit. J’amorce une mouvement lattéral pour me lever mais impossible de bouger... Je sens que je pars, je ne sens plus mes jambes... je l’appelle :
"Papaaa !"
Il arrive, l’air hagard, son pyjama de travers :
"Qu’est-ce qui se passe fiston ?"
"Je me sens pas bien, je crois que c’est les champignons... il faut m’emmener a l’hôpital"
Il reste en suspend quelques secondes, et malgré le vide que je perçois dans son regard il me dit :
"je vais chercher les clés"
Je suis en suspend, je flotte mon corps ne me répond plus. L’effet secondaire de ces champignons sans doute hallucinogènes.
Je m’évade, je me disloque, je me fragmente dans l’univers.
A quoi bon lutter...
Des petits gris me tendent les bras ils sont là pour moi, je le sais.
Je n’irai pas avec cette girole malsaine mais eux mes jolis gris je vais les suivre.
La girole malodorante me dit qu’elle a les clés de son véhicule mais je préfère prendre la soucoupe avec mes chers argentés, rien ne me retiens je m’envole...
