Je n’ai pas encore donné de nom à ma tête, mais c’est prévu. J’ai été un peu bousculé ces derniers temps. Et, puis, un prénom, c’est important. C’est un point de départ, le début d’un chemin. Alors, il faut attendre le bon moment. Bon, pour revenir à mon nez, c’est vrai, c’est pas moi qui ai choisi. Des fois, il y a des moments où les choses arrivent toutes seules à vous. De l’intérieur. Et puis on les adopte, malgré nous. "Jean-Claude" attendait à l’intérieur. Depuis longtemps. C’était le deuxième prénom de mon petit frère. J’ai bien essayé d’esquiver, j’ai tenté "Daniel", "Léo" ou encore "Paul", des prénoms courts. A la mode. Mais mon nez est resté bloqué sur "Jean-Claude".
"Jean Claude" un prénom robuste, un prénom qui s’étale. Longtemps j’ai eu du mal à accepter ce nez épais et large. Ce pif, ce tarin, ce blair qui se présente comme un attribut de moi-même et dont je ne peux me défaire. Lui parler, le nommer, l’imaginer comme un être ayant sa vie propre m’ont permis de prendre de la hauteur et de voir plus loin que le bout de mon nez !
Le bout de mon nez, que j’effleure du bout des doigts, et qu’à demi mot je nomme, Jean-Claude, comme une histoire sur le bout de la langue qui, mise bout à bout, s’écrit sans embout.
Parfois à bout de souffle et pris, parfois tonique et aux aguets sur les odeurs, Jean-Claude aime voyager et découvrir mille et une saveurs.
En voilà une, d’histoire. Au Népal, devant tant d’odorat, Jean-Claude devint pâle.
Jean-Claude, le nez pâle qui pâlit au Népal. Une première pour ce nez qui se rêvait pourtant grand aventurier. Le voila confronté à un problème d’odeur et de renifleur ! Le problème étant que non seulement des odeurs il y en avait trop, beaucoup trop, mais des professionnels de l’odorat, des nez qualifiés, expérimentés, des vieux nez de la vieille on en trouvait par milliers. Grosse pression pour Jean-claude ! Lui qui voulait recenser toutes les odeurs dans son carnet de nez voyageur. Difficile d’innover face à de si grands nez ! Mais il se ressaisit, il prit ses narines à deux mains, il partit à l’attaque d’une petite rue sinueuse. Me chargeant de noter la moindre petite odeur. Vers l’infini et l’odorat !
